VG2020 : 19 arrivées, 6 encore en mer
Les Sables d’Olonne ont vibré toute la journée d’hier au rythme des cinq dernières arrivées. Arnaud Boissières (15e) ouvrait le bal de la journée un peu avant 9h, qui se terminait à 0h57 très exactement avec le franchissement de la ligne par Pip Hare en 19e position.
Avec Kojiro Shiraishi (16e), Alan Roura (17e) et Stéphane Le Diraison (18e), le club des cinq est arrivé en 16 heures ! L’accueil fut des plus chaleureux : nombre de concurrents arrivés aux Sables depuis plusieurs jours étaient présents, à l’image de Jean Le Cam, Yannick Bestaven, Benjamin Dutreux, Romain Attanasio ou encore Louis Burton.
Du petit jour au milieu de la nuit, le ponton du Vendée Globe a tremblé d’émotions ce jeudi 11 février. Les larmes de bonheur, les éclats de rire ont réchauffé les corps et les cœurs malgré le froid polaire. Cali, Kojiro, Alan, Stéphane et Pip sont revenus de leur tour du monde des étoiles plein les yeux. « Cela fait trois mois que je me laisse flotter, et là je flotte de bonheur » souriait le skipper de La Mie Câline-Artisans Artipôle au moment de poser pied à terre, entamant une démarche chaloupée par près de 95 jours de mer.
Des regards au-delà des mots
Hilare, Kojiro Shiraishi rayonnait, remerciant son équipe et son fier navire de l’avoir aidé à boucler la boucle. Il est le premier Asiatique à avoir inscrit son nom sur le Vendée Globe : « Ma plus grande satisfaction c’est que maintenant, quand on écrit Kojiro Shiraishi sur internet au Japon, c’est le Vendée Globe qui ressort. Je suis super fier de ça. Je suis le premier marin asiatique à boucler le tour, j’espère maintenant qu’un autre skipper s’alignera sur le départ de cette course dans le futur. » L’incroyable Pip Hare, quasi inconnue du grand public a gagné les cœurs et affichait le même sourire qu’en mer : celui d’une femme heureuse et comblée. « Ce furent les trois plus beaux mois de ma vie ! » expliquait-elle ce matin lors de sa conférence de presse. La Fabrique et Time for Oceans ont embouqué le chenal cet après-midi laissant les honneurs à Pip Hare. Des compagnons de route et des concurrents qui ont créé des liens forts. « Avec Kojiro on était à vue aux Açores à l’aller, Pip Hare a fait une très belle course avec son vieux bateau, Didac aussi. Tous les six, on n’aura pas besoin de beaucoup se parler, les regards suffiront, on sait ce qu’on a vécu et ce qu’on a partagé. On a hâte de passer du temps ensemble et on l’aura bien mérité. » exprimait Stéphane le Diraison juste avant d’arriver.
Les six derniers IMOCA dans l’Atlantique Nord
Après 97 jours de mer, Didac Costa devrait franchir la ligne d’arrivée demain en fin d’après-midi. Le skipper de One Planet One Ocean se trouve désormais seul, le peloton qu’il collait étant arrivé hier.
Au sud de l’archipel des Açores, Clément Giraud et Miranda Merron, talonnés par Manuel Cousin, qui a pu reprendre sa course après 48 heures de réparation à la suite d’une avarie de quille, se rapprochent des Sables d’Olonne dans des conditions monstrueuses. Ils doivent actuellement contourner une dépression au sud des Açores qui a généré une houle de plus de 6 mètres, rendant la navigation difficile pour les marins.
Alexia Barrier et Ari Huusela ont passé pour la deuxième fois l’équateur sur ce tour du monde et se trouvent donc désormais dans l’hémisphère Nord. Ils poursuivent leur remontée avec toujours autant d’enthousiasme et devraient clôturer cette fabuleuse neuvième édition à la fin du mois.
Ils ont dit
Alan Roura, La Fabrique
Je remercie mon bateau de m’avoir ramené là, c’était ma dernière course avec, c’était une manière de lui dire au revoir. C’est un bateau que j’aime beaucoup. C’était le mot de la fin.
Avec du recul, on s’est rendu compte avec d’autres skippers que quand tu pars sur le 2ème, tu sais à quoi t’attendre donc tu tires différemment sur le bateau que la première fois, il y a moins la fougue de la jeunesse.
C’était un Vendée Globe difficile avec de nombreux problèmes techniques. Il a fallu mettre la course de côté, pour ramener le bateau à bon port. Je suis parti en tant que compétiteur et j’ai fini en aventurier. Je suis très content de voir mes concurrents, ça fait plaisir de se retrouver. C’est un moment de partage, car on sait ce qu’on a vécu, on sait la difficulté que c’était et c’est une fierté de se retrouver tous ensemble.
Il y a eu plusieurs courses dans la course, avec différents pelotons. J’ai beaucoup échangé avec mes concurrents, c’était des moments inoubliables, j’ai appris à rencontrer et connaître des marins. C’était une belle bagarre et beaucoup de plaisir à naviguer avec des gens avec un bon état d’esprit.
C’est très étonnant d’arriver de nuit. Et aujourd’hui, même si les quais sont bloqués, la remontée du chenal était très émouvante, très intime. On a fait quelque chose de grand, même si l’arrivée était difficile. C’est un super événement.
Stéphane Le Diraison, Time for Oceans
Comment résumer une épreuve aussi exigeante et entière ? C’est la course de tous les extrêmes et contrastes. Je suis venu ici pour me mettre au défi pour réaliser ce tour du monde en course. J’ai été face à un certain nombre d’obstacles, qu’ils soient météo, techniques ou dans la tête. C’est un sublime exercice pour aller au bout de soi pour dépasser ses limites. Ça a un impact sur tout le reste de ma vie, ça m’a permis de réfléchir différemment, car on se retrouve face à soi-même et seul face à ses forces et faiblesses. Je pense très bien me connaître désormais. Il y a eu beaucoup de joie sur des moments simples de pur plaisir, je pense au passage du Cap Horn dont j’ai tant rêvé en lisant les récits des marins. C’était quelque chose de très fort.
Kojiro Shiraishi a vécu la même avarie en 2016, on a partagé les mêmes émotions dans la course. Quelques regards suffisent pour partager ces émotions. C’est beau de partager cette réussite ensemble. Dans le gros temps, il y a beaucoup de bienveillance et de partage de conseils. Il s’est passé quelque chose de particulier sur cette édition, il y avait beaucoup d’échanges.
On dit que le Vendée Globe c’est un problème par jour. Quand on a quitté le mouillage, on est parti en avant au lieu de partir en arrière donc on a pris un bout dans l’hélice, ce n’est pas très grave normalement, mais avec la houle l’arbre d’hélice s’est arraché. J’ai tout de suite vu donc j’ai limité les dégâts. In fine ce n’est pas très grave, car le bateau est sécurisé et on n’a pas noyé le système électrique. On va réparer maintenant ! Une arrivée en semi-rigide, c’est chic aussi !
Je suis venu avec la ferme intention de donner le meilleur de moi, mais toujours avec la ferme attention de boucler le tour. C’est ça qui est formidable.
Pip Hare, Medallia
Je trouvais important d’avoir un objectif sportif sur ce Vendée Globe, mais il fallait aussi faire en fonction de l’âge du bateau. Étant une skipper britannique, mon objectif était de réaliser un meilleur temps qu’Ellen MacArthur en 2000, c’est-à-dire 94 jours. Sur une partie de la course, j’ai bien cru que j’y arriverais. J’aurais pu, je sais ou j’ai perdu du temps, là où j’en ai gagné et finalement je ne suis pas loin de cet objectif. Je n’ai aucun regret, j’ai commencé avec rien. Au début, j’ai fait un prêt personnel à la banque. J’ai fait au mieux par rapport au délai qui m’était attribué.
Il y a beaucoup de discussions, mais si je pouvais avoir accès à un bateau de la génération 2016, ça serait extraordinaire. La réflexion porte sur les bateaux de 2016 tout d’abord pour des questions financières, mais aussi, car je ne me vois pas sur un de ces bateaux dernières générations. C’est trop loin de la façon dont je sais naviguer, je trouve que le skipper est trop détaché de son bateau.
Avec Didac, on avait des discussions, on se disait qu’il devait y avoir deux courses dans cette course, ceux qui avaient un cockpit et ceux qui n’en avaient pas. Par rapport aux autres qui étaient à l’avant, c’était beaucoup plus physique. Par exemple, pour prendre un ris, je devais faire 4 fois le tour du bateau, pour régler les voiles d’avant, à chaque fois je devais aller à l’avant au niveau des enrouleurs donc je devais forcément sortir. C’était plus éprouvant. Mais ce dont je me suis rendue compte, c’est que dans les mers du Sud, alors que ceux de devant devaient ralentir, moi je pouvais pousser mon bateau, j’adorais ça !
Classement à 18h00 Heure Française
(…)
- Didac Costa, One Planet, One Ocean, à 269.52 milles de l’arrivée
- Clément Giraud, Compagnie du Lit / Jiliti, à 775.15 milles du 20e
- Miranda Merron, Campagne de France, à 1145.1 milles du 20e
- Manuel Cousin, Groupe Sétin, à 1468.48 milles du 20e
- Alexia Barrier, TSE – 4myPlanet, à 2848.22 milles du 20e
Crédit Photo : JL Carli
Tags sur NauticNews : Vendée Globe, VG2020
– CP –
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