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Vendée Globe: Dame fortune est en forme

C’est comme dans le scénario d’un film. Combien y avait-il de possibilités que Vincent Riou croise la route d’une tonne d’amarrage à la dérive en Atlantique Sud ? Et comment imaginer les conséquences que cette rencontre fortuite risquait de provoquer ? Vincent, hier candidat à la victoire, est aujourd’hui dans l’incertitude, sans garantie de pouvoir continuer.

Décidément, Dame Fortune s’est levée du mauvais pied cette année. Après Kito de Pavant (Groupe Bel) et Louis Burton (Bureau Vallée), victimes d’un abordage avec un chalutier, c’est maintenant Vincent Riou qui, en plein Atlantique Sud, croise un engin flottant métallique à la dérive. A quelques mètres près, le skipper de PRB ne s’en serait peut-être jamais rendu compte. Et le voilà en train de cogiter pour savoir s’il est raisonnable d’envisager poursuivre son tour du monde. Il lui faut, à la fois, surveiller si la blessure de son bateau ne s’aggrave pas, entrer en relation avec son équipe technique pour faire un diagnostic le plus précis possible, recenser les points d’escale potentielle pour mouiller son bateau et réparer par ses propres moyens, sans oublier de tenir informé tous ceux qui suivent son parcours… C’est beaucoup pour un seul homme, fut-il un marin d’exception.

Pas de forfanterie

Pour ceux qui continuent leur descente vers le sud, cet accident vient rappeler à quel point le hasard est parfois versatile. François Gabart (MACIF), Jean-Pierre Dick (Virbac-Paprec 3) ou bien encore Armel Le Cléac’h (Banque Populaire) le savent bien qui abordent avec une grande humilité le plat de résistance à venir, les mers du Sud, alors que le hors-d’œuvre a pour certains un goût amer. Bernard Stamm (Cheminées Poujoulat) parle ainsi pudiquement de bricoles plus ou moins importantes à régler. Parmi elles, une nouvelle grimpette dans le mât pour essayer de  réparer son hook de génois, ou la réparation d’un de ses hydrogénérateurs, endommagé au large du Portugal. François Gabart quant à lui compte sur une préparation exemplaire pour s’éviter de tels exercices. Il sait que la navigation sera autrement plus complexe d’ici une bonne semaine et que toutes les forces méritent d’être économisées.

Derrière le groupe de tête, les concurrents sont toujours soumis au régime de la douche écossaise. Après une belle remontée, Bertrand de Broc (Votre Nom autour du Monde) s’est fait piéger dans le pot au noir et perd une grande part de ses dividendes. Arnaud Boissières (Akena Vérandas) se construit un moral tout neuf à l’occasion du passage de l’équateur. Une manière de se dire que l’Atlantique Nord et son cortège de déconvenues sont maintenant derrière. Quatre ans auparavant, les mers du Sud lui avaient plutôt réussi. Il pourrait, tel Kito de Pavant sur sa plage de l’Espiguette, regarder le cœur en berne, les copains naviguer. Le fait d’être encore en course est déjà un privilège de qualité et Cali nous rappelle, à son entrée dans l’hémisphère sud, qu’il compte bien en profiter. Vincent Riou quant à lui, faire route sous voilure réduite, au sud-ouest dans l’espoir de trouver un abri pour tenter une réparation.

Vincent Riou (FRA, PRB): Ce matin vers 4h45, je me suis mis à la table à carte pour l’analyse du premier fichier météo de la journée. Vers 5h il y a eu un choc violent, un gros crac, le bateau s’est arrêté. Je suis sorti en courant. J’ai vu défiler à l’arrière du bateau une grosse tonne circulaire et j’ai tout de suite compris que j’étais entré en collision avec cet objet qui n’avait rien à faire là. J’ai arrêté le bateau et je suis allé constater qu’il était sérieusement endommagé au niveau tribord avant, au milieu de la partie verticale du bordé. La déchirure fait 1,30m, le bordé est abîmé 50cm au dessus et 50 cm en dessous.

Cette nuit, je suis allé directement à l’avant, parce que c’est là que j’ai entendu le choc. Mais en inspectant la coque ce matin, j’ai vu qu’il y avait aussi le tirant d’outrigger qui était endommagé. Ce ne sont pas de bonnes nouvelles. Pour réparer l’avant de manière fiable, je pense être en état de trouver une solution. Le problème, c’est la température : il fait 30 degrés dans PRB donc je ne vais pas pouvoir travailler quand je veux. J’essaie de faire l’analyse la plus cohérente et rationnelle possible pour voir comment je peux envisager la suite de la course. Le reste ne m’intéresse pas.

François Gabart (FRA, Macif): Le ciel est couvert et le vent est beaucoup plus instable depuis cette nuit. C’est un peu plus difficile à gérer, il faut régler les voiles, ça avance toujours même s’il y a des petits trous de vent. Je me suis vraiment reposé avec des conditions agréables depuis l’équateur. On peut prendre soin de soi et du bateau et tant mieux, car je pense que les prochaines semaines vont être difficiles. Il faut en profiter. Il y a forcément une grosse envie d’aller dans les mers du sud pour voir ce que c’est. Je suis ravi d’être là. Je veux les vivre mais il faudra aussi de la prudence, car je sais que ce sont des navigations dangereuses. Je ne prendrai pas de risques inutiles, je ferai attention.

Jean-Pierre Dick (FRA, Virbac Paprec 3): Cette nuit, ça a été assez sport avec beaucoup d’orages. Il y a eu un lot de giboulées et des risées très fortes. Il fallait faire pas mal de manœuvres pour optimiser au mieux le vent. Le bateau glisse bien, il n’y a pas de souci à bord. Il faut se forcer à aller dormir. C’est vrai que depuis le départ, je n’ai fait que deux choses : veiller à la marche du bateau et dormir. J’espère maintenant profiter un peu plus et écouter de la musique.

Bernard Stamm (SUI, Cheminées Poujoulat): Je souffle un peu donc c’est pas mal. Je ne peux pas très bien régler le génois que j’ai réparé, car il est mal fixé en haut. Il me reste, en plus, deux ou trois bricoles. Au large du Portugal, j’ai arraché l’hydro générateur tribord que je n’ai pas eu le temps de remettre,  mais sinon tout va bien. J’envisage de remonter dans le mât. Quand je suis monté, on était au près avec 13-14 nœuds de vent donc j’ai dû faire au plus pressé. Du coup, je vais remontrer pour voir si je peux récupérer le hook. Je suis resté 1h40 en tête de mât la dernière fois. C’est assez dangereux. Je mets un casque en haut du mât, car si je prends un coup, c’est la misère.

Crédit Photo: JM Liot

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– CP –

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