Transat Québec – Saint Malo: où l’on parle d’arrivée…
La nouvelle et puissante dépression atlantique qui concerne en ce moment et à des degrés fluctuants l’ensemble de la flotte de la Transat Québec Saint-Malo précipite les débats au point que d’un bateau à l‘autre on commence déjà à envisager le final et l’arrivée sur Saint-Malo. Erwan Le Roux (FenêtréA Cardinal 3), le plus près du but malgré un franchissement aussi obligé que délicat à négocier du côté du Fastnet, est ainsi attendu dès mercredi 1er août tard dans la nuit. Les premiers monocoques de Class40 pourraient disputer leur haletant final dès la nuit de vendredi à samedi prochain 4 août. Quant au gros du peloton, extrêmement compact après 8 jours et plus de 1 800 milles de course, il propose ni plus ni moins aux Malouins épris de belles histoires de mer, et ils sont nombreux, une arrivée étrave dans tableau arrière aussi haletante que spectaculaire entre le 6 et le 8 août. Les pronostics vont bon train et d’aucuns, d’un bord à l’autre, reconnaissent à mots non déguisés la suprématie des 4 voiliers détachés depuis le passage sous Terre-Neuve ; la victoire ne devrait sans doute pas échapper à Campagne de France d’Halvard Mabire, Eole Generation – GDF SUEZ de Sébastien Rogues, Geodis de Fabrice Amedeo ou Mare à l’allemand Jörg Riechers. Reste à déterminer l’ordre final de ce carré prétendument gagnant. Et malgré des écarts qui se sont considérablement étirés ces dernières 24 heures, Riechers navigant par exemple à plus de 80 milles de l’impressionnant leader Halvard Mabire, bien malin qui pourrait ce soir s’engager sur un ordre de passage final à la pointe de Moulinet, qui marque devant Dinard l’arrivée de cette si prenante Transat.
Des poursuivants groupés
24, 62, 74, ne sont pas les premiers chiffres du tirage d’une quelconque loterie mais bel et bien les premiers écarts entre les 4 premiers Class40 de cette 8ème édition de la Transat Québec Saint-Malo. Mais derrière ces 4 équipages qui peuvent encore espérer l’emporter, la bataille fait rage pour la cinquième place. D’Aurélien Ducroz sur Latitude Neige – Longitude Mer, cinquième à 129 milles du leader à Christophe Coatnoan sur Partouche, quatorzième à 168,3 milles, les écarts sont faibles et 9 Class40 se battent pour grappiller ces quelques places. Dans ce groupe de 9 et outre les deux précédemment cités, sont présents, Aloys Le Claquin sur Jack in the Box (131,1 milles), Michel Kleinjans sur Roaring Forty 2 (135,4 milles), Thierry Bouchard sur Comiris-Elior (140,8 milles), Stéphane Le Diraison sur IX Blue (141,8 milles), Mathias Blumencron sur Red (146,4 milles), David Augeix sur EDF Energies Nouvelles (147,7 milles), Jean-Edouard Criquioche sur Sevenstar Yachttransport (155,2 milles) et Jacques Fournier sur Groupe Picoty (162,5 milles). C’est sur un axe Nord Sud que ce groupe évolue en direction de Saint-Malo dans un flux qui pour le moment les porte assez vite. Entre les deux derniers classements, celui de 11h et celui de 15h, EDF Energies Nouvelles a été crédité de la meilleure progression avec 54,1 milles en 4 heures. Le centre de la flotte navigue plus vite, mais il faudrait un grand revirement de situation pour bouleverser l’ordre des 4 premiers. « Je vois mal comment nous pourrions revenir sur les quatre bateaux devant. Le vainqueur est dans ce groupe » nous confiait Arnaud Boissières sur Groupe Picoty.
C’est donc très certainement entre Halvard Mabire sur Campagne de France, Sébastien Rogues sur Eole Generation GDF SUEZ, Fabrice Amedeo sur Geodis et Jörg Riechers sur Mare que la victoire va se jouer mais il faudra passer sans encombre entre les mailles du filet dépressionnaire qui va toucher et qui commence à toucher les 20 Class40 engagés dans cette édition 2012 de la Transat Québec Saint-Malo.
Le Roux pour un record ?
En 2008, le Malouin Franck-Yves Escoffier remportait la Transat Québec-Saint Malo catégorie Multi50 et établissait un record sur la distance en 11 jours, 3 heures, et 19 minutes. Battre ce chrono figure au premier chef des priorités que s’est lui-même fixées Erwan Le Roux sur FenêtréA Cardinal 3. Ce sera chose faite s’il entre à Saint-Malo avant jeudi 2 aout à 20 heures 54 minutes et 14 secondes françaises. Les dernières prévisions le placent en avance sur cet objectif. Il continue de s’imposer dans ce but et dans le fort vent de sud-ouest un tempo élevé à 14,6 nœuds de moyenne par 24 heures en gain efficace sur la route. Sa trajectoire est scandée par les empannages et c’est à plus de 20 nœuds en permanence que FenêtréA Cardinal 3 remonte en zigzagant vers le sud de l’Irlande. Le Multi50 profite de la rapide progression en son nord du centre de la dépression. Le vent orienté sud-ouest devrait monter à plus de 25 nœuds en mer d’Irlande. En prenant encore plus de sud après son passage au Fastnet, le vent va imposer au grand trimaran une navigation des plus inconfortables avant une entrée en Manche aux allures plus débridées. Sa place de dauphin fait l’objet de convoitises exacerbées entre le Multi50 Vers un Monde sans Sida d’Erik Nigon qui tient pour l’heure et pour 16 petits milles la corde, face au trimaran de 60 pieds Défi Saint-Malo Agglo de Gilles Lamiré. Cette classe Open comprend, on ne l’oublie pas deux grands monocoques, Vento Di Sardegna de l’Italien Andrea Mura, en passe de réussir son pari qui consistait pour lui à damer le pion à toute la flotte des 40 pieds lancée sur un même parcours excluant le passage au Fastnet. Georges Leblanc et son VOR 65 Océan Phénix ferment la marche de ce groupe, et naviguent devant les derniers Class40.
Mots du large…
Partouche, 14ème à 168 milles
« Le jour se lève à bord de Partouche et, depuis que nous avons touché le vent de nord tant attendu, miracle, nous avons aussi changé de gris. Parce que, sur la Québec Saint-Malo, vous venez prendre un « cours de gris ». Le gris bouché, le gris quasi noir, le gris pluvieux, le gris aérien, le gris qui laisse planer l’espoir d’un peu de soleil, le gris désespérant, accompagné de bruine, le gris définitif, le gris breton, qui vous rappelle la maison. Bref, comme dit Christophe, c’est « l’Atlantique nord, quoi ! » Et, ce matin, c’est Byzance, on entrevoit distinctement des grands morceaux de ciel bleu derrière nos copains nuages… Rassurez-vous, cela ne devrait pas durer. A part ça, nous avons entamé cette nuit, comme la majorité de la flotte, le long bord de travers, dans du vent de nord, qui doit nous amener pas loin de l’entrée de la Manche. Pour l’instant une vingtaine de nœuds, mais c’est déjà sport à l’intérieur où il faut bien s’accrocher. Cela devrait se renforcer, mais le bateau a été bien vérifié hier soir et nous sommes prêts, même si cela s’annonce un chouia monotone. Bord à bord avec Picoty, notre compagnon de jeu préféré, on est bien contents d’avoir empanné tôt hier matin et d’être revenus dans le jeu avec le reste du peloton. Même si le numéro des mecs de devant est impressionnant… »
Mare – Ryan Breymaier
« Jusqu’à présent, nous étions plutôt content de nous ; mais qui vit par l’épée meurt par l’épée, et en ce qui nous concerne, il s’agit de la force du vent. Nous nous pensions très malins il y a deux jours en parant Saint-Pierre en bonne position mais on a été un peu trop présomptueux et on est monté trop au nord sur un long bord bâbord. Depuis, on a laissé des plumes par rapport à nos camarades plus au sud qui ont bénéficié d’un meilleur angle de vent. Nous privilégions à présent la vitesse sur la route au portant dans de petits airs un peu trop près du centre de la dépression, tout en discutant de l’opportunité d’envoyer notre fragile grand spinnacker. La décision est prise ; on l’envoie, et les paris sont ouverts quant au temps qu’il tiendra. Sam l’optimiste dit qu’il tiendra jusqu’à ce qu’on décide de l’affaler. Rémi, le maître voilier parie sur une quinzaine d’heures. Jörg l’entêté, 14 heures ; et votre serviteur, tout en réalisme… ne se prononce pas !
10 minutes plus tard, Jörg aperçoit une déchirure de 5 cm là où on venait de réparer. Retour au spi medium. Même vitesse, mais 5 degrés plus haut que la route ! Au moins, il nous reste de la nourriture… sauf en ce qui concerne le chocolat, dévoré par le quart précédent… »
Latitude Neige-Longitude Mer, Aurélien Ducroz
« Fin de nuit et matinée très compliquée sur Latitude Neige – Longitude Mer; en effet, vers 5h, c’est le point d’accroche de l’amure du grand spi qui casse. Pas très grave mais de la couture en perspective ! Ensuite, moins drôle ! Vers 8h, c’est la poulie arrière d’écoute de gennacker qui casse et qui emporte le balcon arrière du bateau, créant de nombreux trous dont une fissure sur l’arrière de la coque. Tout cela ne nous empêche pas d’avancer. Il n’y a pas de voie d’eau, la fissure est sur l’arrière de la coque donc pas de problème. Bref, on commence à être un peu crâmé par les réparations quand vers 9h30, la GV tombe ! Et oui le lashing de tête de mât cède également, et le moral aussi à vrai dire ! Mais bon, pas découragés. Nous avons envoyé Eric Peron en tête de mât dans 25 nœuds récupérer la drisse pour pouvoir réparer ! ! ! Nous somme de nouveau à fond prêts à ne rien lâcher ! »
Crédit Photo: XDachez.com
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– CP –
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