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VG2020 : Damien Seguin actuellement 3ème

« Je me prends à rêver de passer dans le top 5 au Cap Horn ! Ce serait dingue ! ». Pas si dingue, pas si fou, pas si onirique. En ce 51e jour de course, à 1600 milles du Cap Horn, le bizuth Damien Seguin vient de s’emparer de la 3e place. Son bateau rouge devance LinkedOut de quelques milles au pointage de 15 heures.

Thomas Ruyant a beaucoup perdu à Noël lorsqu’il est parti dans le Nord contourner une excroissance anticyclonique. Sa position d’alors ne lui laissait pas d’autres choix. Il en entrevoyait déjà les conséquences, mais le résultat est aujourd’hui probablement difficile à encaisser pour celui qui n’a jamais décroché du podium depuis un mois et demi. Parallèlement, le double champion paralympique Damien Seguin navigue extrêmement bien, menant son bateau à des vitesses moyennes élevées, empannant au bon endroit.

Comme Damien, la horde de poursuivants en embuscade peut elle aussi se prendre à rêver de gloire, tant les écarts sont minces. 370 milles – soit en gros une journée de mer – entre Bestaven, 1er et Pedote 10e, ce n’est rien. Il suffit d’un pépin technique – tout devient rapidement fastidieux, long et compliqué à réparer pour un homme seul sur ces grands monocoques de 18 mètres – pour hypothéquer une avance construite sur des dizaines de jours d’efforts.

Un Cap Horn comme dans les films

Et des forces, il en faut aujourd’hui pour tenir la cadence au sein du top 14 qui enchaîne les empannages par 55 degrés Sud, dans un vent d’Ouest soutenu (30 nœuds) et une mer bien formée.

Les places risquent ainsi de s’échanger comme au jeu des chaises musicales, alors que Ruyant pourrait voir la chance tourner à nouveau en sa faveur lorsqu’il sera calé en bâbord amure, sur son foil intact. Un bord qui devrait également sourire à Apivia.

Toutefois, un autre danger menace : une dépression secondaire venue du Nord est en train de fondre sur la tête de course en se creusant. Ce phénomène se déplace vers le Sud-Est, va buter sur les côtes chiliennes, au vent des hauts sommets de la Cordillère des Andes et glisser le long des terres jusqu’au Cap Horn, dans un formidable couloir d’accélération…

« Ça ressemble à un passage du Horn comme on les redoute » commentait ce matin Sébastien Josse, consultant météo pour le Vendée Globe. Cette entrée en 2021 en mode survie obligera probablement les premiers à naviguer prudemment, donc lentement, laissant la porte ouverte à un nouveau regroupement à la pointe de l’Amérique du Sud.

Ces petits riens qui font de grandes joies

Mais avant de penser à cette délivrance, les journées se succèdent avec leur lot de contrariétés. Un problème de voile d’avant pour Armel Tripon (13e), un pilote automatique remonté à l’envers, cause d’un gros départ au tas pour Arnaud Boissières (16e), un rail de hook de grand-voile finalement rafistolé pour Stéphane Le Diraison (19e), une bastaque cassée (mais réparée) pour Alexia Barrier (25e).

Entre les petites et les grosses frayeurs, malgré tout, il y a des sourires et de la joie. Comme celle de Romain Attanasio qui se régale du souffle chaud pulsé par le tuyau du ventilateur de son moteur glissé dans la salopette de son ciré, celle de Giancarlo Pedote qui aperçoit (enfin) le soleil, astre réconfortant, ou comme Pip Hare (17e), hilare au passage de l’antiméridien, et qui semble vivre son premier Vendée Globe dans un état d’épanouissement total.

Ils ont dit

Damien Seguin, Groupe APICIL

Ce n’est pas simple, les conditions de navigation ne sont pas faciles. La mer est démontée. Les 48 dernières heures n’ont pas été de tout repos avec une mer de face et le bateau qui tapait ! Là, j’ai environ 30 nœuds de vent, mais cette nuit, j’ai eu jusqu’à 40 nœuds. J’ai réussi à sortir du groupe. Je suis content. Le bateau marche fort. Une fois que tu as trouvé le bon réglage, que tu as choisi la bonne combinaison de voiles, tu ne peux pas faire grand-chose de plus. Tu programmes quelques manœuvres notamment des prises de ris et il ne faut pas les rater ! Mais je me suis bien placé et j’ai réussi à aller vite. J’ai le bateau pour ça. Il est fiable et optimisé pour être sur l’arrière. C’est sûr que dans ces conditions, tu subis un peu, tu pries pour que le pilote barre bien. Je n’ai pas le choix avec le pilote, il faut que je lui fasse confiance. Mais ça se passe plutôt bien. Il m’a fait un raté, mais c’est assez rare. Heureusement, je n’étais pas très loin de la barre.

Cette dernière semaine avant le Cap Horn va être dure. Les modèles voient des choses différentes. On verra… J’arrive à me reposer, mais ce n’est pas toujours facile de s’alimenter. J’ai mangé beaucoup froid ces derniers temps et je viens de prendre un repas chaud.

Je me prends à rêver de passer dans le top 5 au Cap Horn ! Ce serait dingue ! Mais c’est vraiment ce que je vais essayer de faire. Il me faut encore environ sept jours pour y arriver. Ce sera pour dimanche ou lundi, je pense.

Jérémie Beyou, Charal

Quand tu es en compétition aux avant-postes, tu as tendance à regarder ce que les autres font et des fois, attendre que l’autre déclenche… Là, c’est différent, je fais vraiment ce que je pense être bien pour le bateau, bien pour ma stratégie. C’est une façon de naviguer différente de d’habitude, je fais ma route comme si j’étais tout seul sur l’eau. Je trouve une autre satisfaction, dans le plaisir de faire de belles manœuvres, de belles trajectoires.

Charlie Dalin, Apivia

J’ai eu un petit contretemps : j’ai eu un problème avec ma cale basse de foil que j’ai réparée et j’ai passé un peu de temps à bricoler tout ça. J’ai ralenti un peu avant de reprendre ma route. Et il me reste moins de 24 heures de tribord amures : c’est plutôt une bonne nouvelle parce que je vais pouvoir viser le Cap Horn sur l’autre bord. La situation est sous contrôle, maintenant. En ce moment, on a plutôt 25-30 nœuds de vent d’Ouest et je suis actuellement dans une petite molle à 25 nœuds. Il y a quand même un bon flux ! En revanche, la mer est bien formée : c’est la plus grosse que j’ai connue depuis le départ. C’est une belle mer du Sud comme dans les livres… Mon bâbord amures était chaud : j’ai fait quelques départs au tas et je me suis fait percuter par des déferlantes ! Il y avait beaucoup de vent et c’était assez engagé alors que je ne m’étais jamais fait secouer comme cela avant dans les autres dépressions. La mer était beaucoup plus grosse que d’habitude. Heureusement, ça a molli un peu après : désormais, je suis en tribord amures, direction la ZEA. Mais la mer va grossir au fur et à mesure que je vais me décaler vers le Sud. Je compte les heures…

CLASSEMENT à 15h00 Heure Française

1. Yannick Bestaven, Maître CoQ IV, à 8 679,21 milles de l’arrivée
2. Charlie Dalin, Apivia, à 166,75 milles du leader
3. Damien Seguin, Groupe APICIL, à 239,85 milles du leader
4. Thomas Ruyant, LinkedOut, à 246,98 milles du leader
5. Jean Le Cam, Yes We Cam!, à 252,64 milles du leader

Crédit Photo : JL Carli

Tags sur NauticNews : Vendée GlobeVG2020

– CP –

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