Transat Jacques Vabre : arrivées en rafales
Banque Populaire VIII, 2ème monocoque IMOCA
Le deuxième monocoque IMOCA a franchi la ligne d’arrivée brésilienne de la Transat Jacques Vabre le 11/11/2015 à 21h 59’ 09’’ (heure française). Armel Le Cléac’h et Erwan Tabarly ont donc mis 17 jours 08 heure 29 minutes 09 secondes à la vitesse moyenne de 12,97 nœuds sur le parcours théorique de 5 400 milles (10 000 km) entre Le Havre et Itajaí. Mais Banque Populaire VIII a en réalité cumulé 6 119 milles sur l’eau à la vitesse moyenne de 14,69 nœuds, avec 8h 06’ 45’’ d’écart au premier.
Banque Populaire VIII est donc le seul nouveau prototype à foils qui termine cette douzième Transat Jacques Vabre puisque les quatre autres « foilers » ont connu des avaries dès les premiers jours de course. Le duo Armel Le Cléac’h et Erwan Tabarly a incontestablement très bien géré le surcroît de potentiel de ces nouveaux appendices, prenant leur rythme progressivement à l’image de leur long bord en Manche puis vers la dépression irlandaise où ils sont restés prudents et en deçà des possibilités de Banque Populaire VIII.
C’est lors de la descente après les Açores lorsque l’état de la mer et l’angle par rapport au vent sont devenus favorables que le tandem a réellement lâché les chevaux, déboitant par l’Ouest Quéguiner-Leucémie Espoir, puis PRB. A l’intérieur du virage au moment de l’empannage au large des Canaries, le « foiler » a continué à grignoter les milles pour cumuler une trentaine de milles à l’entrée du Pot au Noir. Une Zone de Convergence Inter Tropicale (ZCIT) qui s’est avérée très délicate à anticiper et malgré les efforts de l’équipage pour suivre les oscillations d’un vent très faible et très variable, Banque Populaire VIII devait concéder une trentaine de milles à la sortie de ce marasme météorologique.
Déporté très à l’Ouest avec ses deux concurrents, Banque Populaire VIII n’a pas pu compenser son léger décalage et lors de la grande descente de plus de 1 000 milles vers le Cabo Frio dans des alizés de Sud-Est, puis d’Est à la hauteur de Salvador de Bahia, puis Nord-Est devant Vitoriá, Armel Le Cléac’h et Erwan Tabarly n’ont pu combler leur retard. Ils tentaient un coup tactique en se rapprochant des côtes brésiliennes, slalomant entre les plateformes de forage puis glissant dans le golfe de Rio dans le sillage du leader PRB. Comprenant qu’il devenait très difficile de le dépasser, Banque Populaire VIII contrebordait dans une brise de Nord-Est avant l’arrivée pour s’assurer de sa position face à Yann Eliès et Charlie Dalin : l’écart au premier grimpait alors à une centaine de milles, mais Quéguiner-Leucémie Espoir était toujours dans son tableau arrière.
Et quand les vainqueurs s’amarraient à Itajaí, Banque Populaire VIII n’était plus qu’à une soixantaine de milles : le final était laborieux dans une brise devenue évanescente et c’est en fin d’après-midi locale que le duo franchissait enfin la ligne à plus de vingt nœuds de vitesse dans une bonne bourrasque ! Avec plus de vingt milles d’avance sur Yann Eliès et Charlie Dalin…
Quéguiner-Leucémie Espoir, 3ème IMOCA à Itajaí
Le troisième monocoque IMOCA a franchi la ligne d’arrivée brésilienne de la Transat Jacques Vabre le 11/11/2015 à 23h 31’ 23’’ (heure française). Yann Eliès et Charlie Dalin ont donc mis 17 jours 10 heures 01 minute 23 secondes à la vitesse moyenne de 12,92 nœuds sur le parcours théorique de 5 400 milles (10 000 km) entre Le Havre et Itajaí. Mais Quéguiner-Leucémie Espoir a en réalité cumulé 6 056 milles sur l’eau à la vitesse moyenne de 14,49 nœuds, à 9h 38’ 59’’ du premier.
C’est un très beau parcours que Yann Eliès et Charlie Dalin ont bouclé à quelques heures seulement du vainqueur à Itajaí : le duo réalisait une superbe performance en suivant le rythme endiablé donné par les « foilers » après le coup de canon du départ au Havre. Et judicieusement, il glissait légèrement plus Sud que ses concurrents pour aborder la dépression irlandaise à l’Ouest. Premier à virer de bord dans une mer hachée et une forte brise, Quéguiner-Leucémie Espoir prenait la tête de la flotte IMOCA déjà clairsemée par les avaries.
Après la négociation d’un front froid et l’arrivée d’une deuxième perturbation, Quéguiner-Leucémie Espoir tenait toujours la corde mais voyait son presque sistership PRB, puis le « foiler » Banque Populaire VIII le déborder avant les Açores. L’équipage tentait de suivre le tempo soutenu mais perdait des milles au point d’en concéder une quinzaine à l’entrée du Pot au Noir. Les trois monocoques IMOCA bataillaient alors ferme pour sortir de ces calmes prolongés, essayaient une porte de sortie par l’Ouest pour finalement se retrouver quasiment au Nord de l’archipel de Fernando de Noronha : une trajectoire inhabituelle…
Il fallait donc serrer le vent de Sud-Est pour parer la corne brésilienne et les vingt milles de retard accumulés à la sortie du Pot au Noir pesaient lourd dans la balance : PRB s’échappait inexorablement tandis que Banque Populaire VIII faisait parler son foil dès qu’il était possible de larguer les écoutes. Yann Eliès et Charlie Dalin ne pouvaient rien faire pour endiguer la fuite qui culminait à 110 milles au large du Cabo Frio ! La traversée du golfe de Rio, un long rush dans un flux de Nord-Est qui s’essoufflait à quelques dizaines de milles de Itajaí, ne pouvait plus changer la donne, surtout lorsque Banque Populaire VIII se recadrait à l’Ouest pour contrer toute velléités d’attaque de Quéguiner-Leucémie Espoir.
L’écart au premier était ainsi inférieur à cent milles quand le vainqueur franchissait la ligne d’arrivée en milieu d’après-midi locale, mais le vent se dispersait sur un plan d’eau de plus en plus lisse : Yann Eliès et Charlie Dalin peinaient à en finir et concluaient juste après que la nuit tombe sur la ville brésilienne…
Ciela Village, deuxième Multi50 à Itajaí
Le deuxième Multi50 a franchi la ligne d’arrivée brésilienne de la Transat Jacques Vabre le 12/11/2015 à 07h 14’ 51’’ (heure française). Thierry Bouchard et Oliver Krauss ont donc mis 17 jours 17 heures 44 minutes 51 secondes à la vitesse moyenne de 12,68 nœuds sur le parcours théorique de 5 400 milles (10 000 km) entre Le Havre et Itajaí. Mais Ciela Village a en réalité cumulé 6 401 milles sur l’eau à la vitesse moyenne de 15,03 nœuds, à 19h 15’ 38’’ du premier.
Ces deux as de la régate en équipage ont découvert la navigation en Multi50… sur cette 12e édition de la Transat Jacques Vabre ! Peu connus dans le milieu de course au large, les skippers de Ciela Village, tous deux chefs d’entreprise, affichent pourtant un joli palmarès : Thierry Bouchard compte, entre autres, 10 participations au Tour de France à La voile (dont une victoire et deux places de deuxième), Oliver Krauss, lui, formé en Figaro, a brillé sur de nombreuses courses en équipages. Sur ce baptême du feu, les deux Méditerranéens ont longuement mené la danse des Multi50. Premiers à pointer leurs étraves vers le sud dans le golfe de Gascogne, Thierry et Oliver étaient en tête de course jusqu’à la latitude des Canaries.
Rattrapés par FenêtréA Cardinal et Arkema, la bagarre commence alors entre les trois Multi50 (rappelons que The French Tech – Rennes Saint-Malo avait subit un choc contre un container), mais Ciela Village rencontre une avarie de fixation de gennaker et se voit dans l’obligation de faire escale à Mindelo au Cap Vert. L’escale dure 28h. Le 3 novembre, c’est avec 150 milles de retard sur Arkema, que Thierry et Oliver repartent tambour battant. Grâce à un léger décalage dans l’ouest, ils regagnent du terrain dans le Pot au Noir, pour revenir à moins de 50 milles du tandem Roucayrol/Dohy devant Recife. L’équipage d’Arkema annonce peu après son intention de faire route sur Salvador de Bahia pour réparer une voie d’eau au niveau de la coque centrale. Thierry et Oliver s’octroient donc la place de deuxième en Multi50 à Itajaí. Une grande première pour ces deux marins qui ont su parfaitement maîtriser leur multicoque qu’ils avaient préparé aux petits oignons (il s’agit de l’ancien Maître Jacques de Loïc Féquet).
Le Souffle du Nord, 4ème monocoque IMOCA à Itajaí
Le Souffle du Nord a franchi la ligne d’arrivée brésilienne de la Transat Jacques Vabre ce jeudi 12 novembre à 14h 57’ 45’’ (heure française). Thomas Ruyant et Adrien Hardy ont donc mis 18 jours 1 heure 27 minutes 45 secondes à la vitesse moyenne de 12,46 nœuds sur le parcours théorique de 5 400 milles (10 000 km) entre Le Havre et Itajaí. Mais Le Souffle du Nord a en réalité cumulé 6 023 milles sur l’eau à la vitesse moyenne de 13,90 nœuds, à 1j 01h 05’ 21’’ du premier.
En reprenant le deuxième monocoque IMOCA dessiné par VPLP-Verdier pour Kito de Pavant en 2007, Thomas Ruyant et Adrien Hardy savaient que leur machine était fiable et performante, même si elle ne pouvait pas contrer les derniers-nés à foils ou la génération précédente optimisée au fil des ans. Simple et original avec son cockpit réduit et ses deux barres à roue, Le Souffle du Nord restait un voilier référence qui avait terminé sixième de la Transat Jacques Vabre dès sa mise en l’eau en 2007 (Kito de Pavant avait alors embarqué Sébastien Col), 2ème en 2009 avec François Gabart comme équipier et 5ème en 2011 avec Yann Régniau.
Et dès les premiers bords au large du Havre, Le Souffle du Nord emmenait le peloton derrière les trois « foilers » et les trois « classiques optimisés », le bateau n’ayant pas eu réellement les moyens et le temps d’être adapté aux nouveaux développements techniques. Mais Thomas Ruyant et Adrien Hardy réalisaient une superbe trajectoire dans le sillage de PRB, avec seulement une dizaine de milles de retard quand il fallut aborder la dépression irlandaise. Sa belle courbe autour du centre de la perturbation le positionnait même provisoirement deuxième juste derrière Quéguiner-Leucémie Espoir !
Mais plus à l’Est que le quatuor leader, le duo concédait du terrain lors du passage du front de la deuxième dépression quand il fallut glisser plein Sud vers les Açores. Et plus proche en conséquence de la zone de transition, le monocoque perdait encore des milles face au futur vainqueur de la Transat Jacques Vabre, et même contre Initiatives Cœur positionné plus à l’Ouest. Le tandem avait beau cravaché, il n’était plus dans le même système météo que les quatre leaders et d’une quarantaine de milles au Nord des Açores, le retard passait à plus de 250 milles en 48 heures, à l’heure de l’empannage vers le Pot au Noir.
Le Souffle du Nord avait donc un nouvel objectif clair avant de franchir l’équateur : déborder le couple de Lamotte-Davies calé dans leur Ouest… La longue descente dans les alizés de Nord-Est lui en donna l’occasion, mais le Pot au Noir s’avéra taquin pour le duo qui sortait au final avec trente milles de décalage. Et il fallut passer devant Recife pour que les deux monocoques naviguent à vue ! C’est donc dans le bord de 1 000 milles vers le cap Frio que Thomas Ruyant et Adrien Hardy réussirent à grignoter mille par mille pour entrer dans le golfe de Rio avec seulement une quarantaine de milles d’avance sur Initiatives Cœur… Et comme il n’y avait pas de coups stratégiques à faire avant l’arrivée, le duo contrôlait son concurrent jusqu’à Itajaí pour s’assurer de la quatrième place des monocoques IMOCA. Un fort beau résultat !
Crédit Photo : JM Liot / DPPI
Tags sur NauticNews: Transat Jacques Vabre, Class40, Multi50, Imoca
CP-
Commentaires