Transat Bretagne-Martinique : Alizé déroutant…
L’alizé n’est pas un long fleuve tranquille. Certes, le vent pousse les solitaires dans la bonne direction, mais il peut se montrer capricieux, imprévisible, voire diablement déroutant. Les figaristes doivent composer avec cette instabilité et se caler les uns par rapport aux autres, au gré des oscillations. Erwan Tabarly (Armor Lux – Comptoir de la Mer) maîtrise parfaitement le jeu, 45 milles devant Gildas Morvan (Cercle Vert) et 67 milles devant Fabien Delahaye (Skipper Macif 2012). Un matelas confortable… Derrière, la quatrième place demeure très convoitée. Yoann Richomme (DLBC – Module Création), Adrien Hardy (Agir Recouvrement) et Anthony Marchand (Bretagne – Crédit Mutuel Performance) sont à la lutte et pressentent déjà une fin de parcours âprement disputée. Pour Eric Baray (Tektôn – AGM/Région Martinique), la course aux ennuis techniques continue : le skipper martiniquais est en escale à Las Palmas pour réparer ses pilotes automatiques.
1 700 milles encore à parcourir jusqu’à la baie de Fort-de-France. Ils vont les mériter les accras et le ti-punch ! Car les solitaires de la Transat Bretagne-Martinique ne cessent de lutter contre les variations du vent pour rester sur la route directe tout en se contrôlant mutuellement. Visiblement, la tâche n’est pas aisée. « Il n’y avait pas beaucoup de vent cette nuit, je suis un peu dégoûté, j’ai vraiment lutté pour faire avancer le bateau. J’ai reperdu ce que j’avais gagné sur Adrien. Je repars à zéro. C’est difficile de régler le bateau car le vent est très changeant » racontait Yoann Richomme ce matin à la vacation. Le malheur des uns fait le bonheur des autres : Adrien Hardy, lui, est content…forcément.
Côté manœuvre, « il faut être dessus » disent les marins. Comprenez que la moindre bascule de vent implique un réglage de spi, un ou plusieurs empannages. Visiblement, les deux bizuths Corentin Horeau (Bretagne – Crédit Mutuel Espoir) et Simon Troël (Les Recycleurs Bretons) ont eu la même idée au même moment : ils ont empanné cet après-midi histoire de se recaler un peu plus au sud dans le sillage du groupe de tête. Pour eux, l’enjeu est de taille : Damien Guillou (La Solidarité Mutualiste) reste en embuscade très au nord de la flotte, pressé de leur passer devant. C’est sûr, quelques milles avant l’arrivée, ce sera le champ de bataille. « Les routages nous font plutôt arriver le 7 avril, et j’ai deux bateaux à dépasser avant de couper la ligne d’arrivée. J’aimerais passer devant Yoann et Adrien » avouait ce matin Anthony Marchand.
Déjà 13 jours de course, 13 jours de régate endiablée, en solitaire, sur des bateaux identiques, encore de nombreux milles à parcourir devant les étraves, le challenge est plutôt salé…
Les cinq premiers à 16 h
- Armor Lux – Comptoir de la Mer (Erwan Tabarly) à 1 762,20 milles de l’arrivée
- Cercle Vert (Gildas Morvan) à 43,94 milles
- Skipper Macif 2012 (Fabien Delahaye) à 66 milles
- DLBC – Module Création (Yoann Richomme) à 104,29 milles
- Agir Recouvrement (Adrien Hardy) à 109,89 milles…
Ils ont dit :
Corentin Horeau (Bretagne – Crédit Mutuel Espoir)
« Je suis revenu sur Simon, ça va commencer à jouer un peu plus. Erwan a empanné, il fait du bâbord, Damien, lui, revient… J’étais en train de regarder l’ordinateur pour voir ce que je vais faire. Je ne suis pas loin d’empanner. Je n’ai pas d’alarme mais j’ai toujours les yeux sur les compteurs. Là, il y a du jeu. Avec Damien qui revient dans le match, il va falloir l’empêcher de passer et rattraper Simon. »
Anthony Marchand (Bretagne – Crédit Mutuel Performance)
« Ca va bien. On était à l’attaque dans la première partie de nuit et ce matin, c’était repos. C’est surtout pour la suite, j’essaie de prendre l’intérieur de l’anticyclone par rapport aux autres, je n’ai pas envie d’être à la queue-leu-leu avec les autres. Hier j’ai empanné, j’ai fait un peu de bâbord. C’était à la faveur d’une bascule inopinée. Les journées passent vite tout de même ! Les routages nous font plutôt arriver le 7 mais la route est encore longue et j’ai deux bateaux à dépasser avant de passer la ligne d’arrivée. »
Arnaud Godart-Philippe (Régates Sénonaises)
« L’idée est de garder un peu de jeu pour la fin de course. Nous verrons ce que ça donne à l’arrivée. Il n’y a rien à perdre, je n’ai pas peur de tenter des coups, je garde du jeu pour la fin. La grand-voile : ça tient ! Maintenant que l’on est au portant, je ne suis plus inquiet. Normalement, elle devrait m’amener jusqu’au bout. J’ai toujours l’ordinateur mais c’est vrai qu’après la première dépression, tout a pris l’humidité. Je passe une heure, voire une heure trente à la table à cartes. On regarde les routages, où sont les concurrents… L’idée est de faire sa route et de faire avancer le bateau le plus vite possible. »
Yoann Richomme (DLBC – Module Création)
« La pression est revenue un peu là. Je ne suis pas très à l’aise avec le décalage qu’il y a avec Adrien, je ne sais pas comment il fait moi je n’arrive pas à faire ce cap-là. J’aurais préféré être dans son axe. Les prévisions ont l’air assez « olé olé ». J’ai failli empanner tout à l’heure mais ça n’a pas duré longtemps. La météo n’est pas conforme aux fichiers. C’est quand même sympa, il y a une belle bagarre. C’est un peu moins venté que ce que j’espérais, ça glisse moins. »
Fabien Delahaye (Skipper Macif 2012)
« Depuis ce matin et pendant quasiment 2 heures j’étais à 6 nœuds et là c’est re-rentré et je suis sur la route. On n’y peut rien, on ne peut pas se téléporter, on fait avec et on se dit que si ça m’arrive, ça arrive aussi aux autres. J’essaie de m’y préparer en amont, j’essaie de m’appliquer sur tout ce qu’il y a faire avant la transat, alimentation, sommeil, préparation du bateau. Si je suis là c’est que je l’ai voulu, mon but est de gagner vers l’ouest, s’il faut empanner je le ferai. »
Crédit Photo: Alexis Courcoux
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– CP –
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